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Contre-pouvoir : 

Le visage des Américains qui œuvrent pour l'immigration  

Ariane Uwamahoro, Jérémi Trudel et Emy Lafortune

Ancre 1

Ces dernières années, le discours anti-immigration s'est exacerbé au sein de l’administration américaine. Ces propos sont cependant loin de faire l'unanimité auprès des habitants des États-Unis. Coup d’oeil sur les citoyens qui se positionnent en faveur de l'immigration.

Sujet de l’immigration aux États-Unis : absence de consensus

Le président des États-Unis a habitué les électeurs américains —et les observateurs internationaux— à ses commentaires acerbes sur l'immigration.

 

Selon le Migration Policy Institute, Donald Trump avait fait de l'immigration « la pièce maîtresse de sa campagne électorale » en 2016. Depuis son élection, il a maintes fois réitéré son intention de réformer les lois sur l'immigration aux États-Unis.

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Ces propositions de changement incluent entre autres d'éliminer le programme Deferred Action for Childhood Arrivals (« Action différée pour les arrivées d'enfants »), qui permet de travailler et d'étudier aux immigrants sans-papiers arrivés aux États-Unis alors qu’ils étaient enfants.  

 

Pour M. Trump, un des objectifs principaux de telles mesures est de contrer l'immigration clandestine, qu'il a souvent décrite comme étant une menace pour les citoyens américains. Il a notamment diffusé de nombreux commentaires négatifs sur une caravane de migrants se dirigeant vers les États-Unis dans les jours précédant les élections de mi-mandat de novembre. Ses prises de position quant aux dangers liés à l’immigration datent cependant de bien avant les élections de mi-mandat, comme le montrent de nombreux messages Twitter publiés sur son compte personnel.  

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* Cliquez sur les photos pour afficher les traductions des messages et les liens vers Twitter.

Ces déclarations présidentielles ont attiré l'attention médiatique mondiale. Elles ne sont cependant pas représentatives de l’opinion publique américaine. Pour Mae Ngai, professeure d'histoire à l'Université de Columbia qui s’intéresse aux questions d’immigration, de citoyenneté et de nationalisme, la plupart des Américains sont au contraire favorables à l'immigration. 

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Mae Ngai était à la soirée organisée par Let's Talk Democracy, dans une bibliothèque du quartier  Queens, à New York, pour parler de l'histoire des lois américaines sur l'immigration. (Crédit photo : Ariane Uwamahoro)

Les propos de Mae Ngai correspondent aux données recueillies lors du plus récent sondage Gallup sur l'opinion américaine quant à l'immigration mené en juin 2018. Selon ce dernier, la majorité (67%) des Américains croient que l'immigration devrait être maintenue à son niveau actuel ou augmentée. Cette proportion est la plus élevée recensée depuis les débuts du sondage, en 1965. 

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En ce qui concerne les immigrants clandestins, ce sont environ 42% des répondants qui ont déclaré « ne ressentir aucune inquiétude  » ou « seulement un peu d’inquiétude » face à leur arrivée aux États-Unis.

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Parmi ces répondants, de nombreux Américains s'expriment et œuvrent ouvertement pour montrer leur soutien envers les immigrants. En voici quelques exemples. ​

Paroles d'artistes

Des artistes américains militant en faveur de l’immigration se sont rassemblés lors de la soirée d’exposition Reframing Immigration organisée dans une librairie communautaire du quartier multiculturel de Washington Heights, à New York. Poètes, artistes visuels et chanteurs en ont profité pour échanger sur les défis rencontrés par les nouveaux arrivants, et sur les façons de venir en aide à ces derniers.

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Dans un pays éminemment divisé sur la question migratoire, les artistes présents souhaitaient briser le discours ambiant par la dénonciation artistique et la mobilisation citoyenne. Les fonds recueillis par la vente des œuvres présentées pendant la soirée ont été remis à une organisation qui milite pour la  protection des droits des personnes immigrantes aux États-Unis.

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Pour l’organisatrice de l’événement, Ashley Causey-Golden, l’objectif de l’exposition était surtout de mettre fin aux préjugés à l’égard des immigrants par le partage d’expériences et par l’art.

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« The personnal is political. »

[Ce qui est personnel est politique.]

—Ashley Causey-Golden

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Les arts sont une forme de contre-pouvoir, affirme l’organisatrice de l’événement. Selon elle, c’est par les décisions individuelles que se traduit la politique. Même les citoyens qui ne se considèrent pas comme étant des activistes ont leur rôle à jouer sur le climat politique entourant des enjeux tels que l’immigration, selon Mme Causey-Golden.

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« Americans have always been immigrants. »

[Les Américains ont toujours été des immigrants.] 

— Abe Loomis

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Pour le chanteur Abe Loomis, la composition de chansons en faveur des réfugiés permet de critiquer le climat politique actuel aux États-Unis. Il dénonce entre autres que certains politiciens ignorent le fait que depuis la création du pays, les immigrants ont toujours été les bienvenus en sol américain. Selon le chanteur, l’immigration est une valeur profondément américaine, bien qu’elle ait toujours amené son lot de défis : « Je crois que cela représente le meilleur de ce qu’est l’Amérique », soutient-il.

 

Une de ses compositions sur les réfugiés nommée « Refugees are welcome here » (« Les réfugiés sont les bienvenus ici ») représente bien cette prise de position.  

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« I want to focus on people's humanity. »

[Je veux me concentrer sur le côté humain des gens.] 

— Isabela Espinal

 

Pour l’artiste Isabela Espinal, les arts lui permettent de partager ses expériences et ses idées en ce qui a trait à l’immigration. C’est par la diffusion de ses œuvres qu’elle s’exprime publiquement sur ses expériences.

 

Elle affirme que les citoyens américains ont tendance à oublier le côté humain de l’immigration, catégorisant les migrants selon leur statut légal. C’est entre autres pour mettre un frein à cette perception qu’elle cherche à mettre l’être humain au premier plan dans ses projets.

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Ancre 2

Œuvre citoyenne

Plusieurs organisations citoyennes pour l’immigration ont vu le jour dans de la ville de New York. Parmi celles-ci, Let’s Talk Democracy tient régulièrement des soirées d’information en collaboration avec une pluralité d’experts. Ces rencontres gratuites ont comme objectif d’éduquer et de responsabiliser les citoyens sur différentes thématiques liées aux fondements de la démocratie.

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Lors d’une de ces rencontres, la Dre Mae Ngai, de l’Université de Columbia, a ouvert une discussion sur l’histoire de la législation de l’immigration aux États-Unis. Pour l’occasion, quelques dizaines de citoyens se sont rassemblés pour venir échanger avec l’experte.

 

L’initiative Let’s Talk Democracy a été fondée peu après les élections de novembre 2016 par la physicienne Ida Messana, afin de répondre à un sentiment d’angoisse perçu chez ses patients issus de l’immigration. Elle explique que les rencontres ont rapidement mené à un changement de ton dans les discours portant sur l’immigration.

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Ida Messana (quatrième à partir de la gauche) a  cofondé l’organisation Let's Talk Democracy. Crédit photo : Jérémi Trudel)

Mike Elsen-Rooney, boursier à l’école de journalisme de Columbia, connaît bien le sujet des immigrants ainsi que les projets qui leur viennent en aide.

 

Il effectue des recherches dans le cadre de The Teacher Project, « un projet explorant les défis systémiques auxquels sont confrontés les étudiants immigrants ».  

Le projet l’a amené à passer en entrevue plus d’une dizaine d’étudiants immigrants dans une école secondaire américaine. Il lui a aussi  permis d’observer les défis auxquels ces derniers sont confrontés : « Il n’y a pas beaucoup de données récentes et solides sur les immigrants clandestins. [...] Au moins 65 000 immigrants clandestins graduent du secondaire chaque année [...] et dans les états comme l’Indiana, qui ne leur offrent pas de prise en charge de leurs frais de scolarité, le nombre d’entre eux qui vont à l’université est extrêmement bas. »

Le travail de Mike Elsen-Rooney lui a aussi permis d’observer les initiatives mises sur pied par les commissions scolaires pour tenter de venir en aide à ces étudiants. 

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Ancre 3

Activités militantes : les activistes

À New York, les groupes militants qui s’opposent aux discours de M. Trump se comptent par dizaines. Ils organisent des rencontres, des événements et des manifestations dans le but de faire connaître leur mécontentement. Rise and Resist, (« Se soulever et résister ») est une organisation créée après les élections de 2016 dans le but de « s’opposer, de perturber et de vaincre tout acte gouvernemental mettant en péril la démocratie, l’égalité et les libertés civiles. » Il compte aujourd’hui près de 10 000 abonnés sur sa page Facebook.

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Jody Kuh est activiste au sein du sous-groupe dédié à l’immigration de Rise and Resist depuis les débuts de l’organisation. Ce groupe a pour but de prendre action contre la plupart des réformes aux lois migratoires suggérées par Trump. « Je cherchais un moyen d’aider, de faire quelque chose de différent et d’être active dans la communauté, et j’ai trouvé Rise and Resist [...]. J’ai trouvé que c’était un groupe créatif qui faisait un travail de protestation très intéressant, et j’ai donc commencé à aller aux réunions. »

 

Son travail consiste surtout à faire pression sur les gouvernements et à éduquer ses concitoyens. La plus récente campagne de son groupe, nommée « abolir I.C.E » (Immigration and Customs Enforcement, « l’agence de police douanière des États-Unis »), incluait entre autres des manifestations et des distributions de dépliants.

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« This isn't for everyone, but I personally am a believer in open borders. »

[Je sais que ce n'est pas le cas de tout le monde, mais je crois personnellement aux frontières ouvertes.]

— Jody Kuh

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Pendant les semaines précédant les élections de mi-mandat, elle a noté une augmentation de la place du sujet de l’immigration dans l’espace public. Selon elle, ces débats pourraient cependant être bénéfiques à la cause de son groupe militant en poussant notamment plus de gens à s’indigner et à se lancer dans le militantisme.

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Philipos Melaku-Bello et ses affiches sont présents depuis près de quarante ans devant la Maison-Blanche. Les sujets pour lesquels il manifeste sont aussi nombreux que variés, et l’immigration en fait partie.  Il s’oppose notamment aux politiques d’expulsion d’immigrants proposées par Donald Trump.

 

Étant lui-même immigrant, il réclame une meilleure inclusion des gens comme lui au sein du peuple américain.

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Philipos Melaku-Bello manifeste depuis près de quarante ans devant la Maison-Blanche. En tant qu'immigrant, il tient à la cause des immigrants et des réfugiés. (Crédit photo : Emy Lafortune) 

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Parmi les nombreuses affiches exposées autour de l'abri de fortune de Philipos Melaku-Bello, l'une d'entre elles porte l'inscription #LoveThyNeighbor (No exceptions), soit « #Aimer son voisin (sans exception) » (Crédit photo : Emy Lafortune)

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L'autre discours politique

Des politiciens se sont aussi lancés, pendant les élections de mi-mandat, dans des campagnes pour la promotion de l’immigration dans le pays, s’opposant aux discours politiques de l’administration de Donald Trump.

 

C’était le cas de Jeremy Cooney, candidat démocrate pour le 56e district du sénat de l’état de New York. Ce dernier s’opposait à Joseph Robach, le sénateur républicain sortant du district.

 

Né en Inde, Jeremy Cooney a été adopté par une mère monoparentale américaine alors qu’il était encore enfant et a grandi au nord de la ville de New York. Il a parfois dû faire face à de la discrimination en vieillissant :

 

« Un souvenir qui m’a le plus marqué, c’est à l’époque que j’étudiais en droit. Je me rendais en Floride avec ma petite amie, et des gardiens de sécurité sont venus me faire descendre de l’avion pour me poser des questions. Quelqu’un dans l’avion leur avait dit qu’il ne se sentait pas en sécurité avec quelqu’un qui me ressemblait [...] Ce genre de moments marque, c’était vraiment basé uniquement sur la couleur de ma peau. »

 

Il croit cependant que les Américains sont mûrs pour un changement : « nous voyons un certain rejet non seulement de la personnalité de notre président, mais aussi des politiques que lui et les républicains du Congrès ont adoptées. »

 

Une grande partie de la plateforme de Jeremy Cooney concernait l’immigration. Ses plans incluaient entre autres d’apporter de l’aide aux immigrants non autorisés afin de leur permettre d’avoir accès à une éducation et à un permis de conduire.

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Crédit photo : site officiel de la campagne de Jeremy Cooney, https://www.onward56.com/

C'est Joseph Robach qui a remporté les élections de mi-mandat. Ce dernier n'a pas donné suite à de nombreuses demandes de commentaires quant à sa plateforme sur l'immigration. La plateforme électorale de M. Robach ne mentionnait pas de mesures sur la question de l’immigration.

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À propos de nous

Ariane Uwamahoro

 ariane.uwamahoro.1@ulaval.ca

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Ariane est étudiante en première année de maîtrise en journalisme international à l'Université Laval. Ses grandes passions sont le journalisme sportif et la radio. Elle est rwandaise et est née à Kigali, dans un petit quartier de Nyamirambo.

Jérémi Trudel

 jeremi.trudel.1@ulaval.ca

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Originaire de La Tuque, en Haute-Mauricie, Jérémi est un étudiant à la maîtrise en journalisme international. Bien qu’il soit un féru de pêche, il se passionne tout autant pour l’actualité internationale et la politique. Il rêve de devenir correspondant à l’étranger pour un média canadien.

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Après avoir grandi à Ottawa, Emy étudie maintenant à la maîtrise en journalisme dans le but de travailler pour les francophones hors Québec. Elle se passionne pour l'art et la culture, la littérature, les auberges jeunesse et la caféine sous toutes ses formes.

Montage audio : Ariane Uwamahoro

Montage vidéo : Jérémi Trudel

Montage web : Emy Lafortune

Recherche, entrevues et textes  : Ariane Uwamahoro, Jérémi Trudel et Emy Lafortune

Correction : Jérémi Trudel et Emy Lafortune

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